CAHIER SPÉCIAL FRANCHISE – JOURNAL LES AFFAIRES – 19 FÉVRIER 2025 rédaction:  Philippe-Jean Poirier

Dans le secteur de la mécanique automobile, entre autres, le manque de main-d’œuvre spécialisée se fait sentir chez beaucoup de franchisés. (Photo: Jimmy Nilsson pour Unsplash)

FRANCHISES. D’un point de vue contractuel, personne ne conteste le fait qu’un franchisé doive assumer la pleine responsabilité du recrutement de son personnel. Toutefois, en tant que partenaire d’affaires officiel, le franchiseur a tout intérêt à soutenir le franchisé dans cette dimension qui peut être cruciale pour la réussite d’un projet entrepreneurial.

« Lors du démarrage d’une franchise, un des principaux facteurs de succès, c’est l’habilité du franchisé de se monter une équipe, de la conserver, de la motiver, de la mobiliser et de s’organiser pour que ça fonctionne », explique Stéphane Breault, consultant en franchisage. Surtout dans le domaine de la restauration et du commerce de détail, insiste-t-il. À eux seuls, ces deux secteurs comptent environ 140 000 emplois, la plupart de premier niveau, peu rémunérés et où il y a peu de possibilités de gravir les échelons. « Dans un établissement de restauration rapide, il fait chaud, ça roule, c’est du stress tout le temps, illustre-t-il. S’il n’y a pas une belle atmosphère au travail, les employés vont rapidement quitter. »

Selon le consultant, les plus petits réseaux de franchiseurs négligent trop souvent leur partie de l’équation, à savoir comment ils peuvent « assister » le franchisé dans son recrutement et sa mobilisation de personnel. Le principal levier des franchiseurs est la formation. D’une part, il peut aborder les compétences RH pour faire des entrevues d’embauche, intégrer des employés, structurer sa rémunération, mener des rencontres de performance, etc. Mais il ne devrait pas se limiter à des contenus techniques. « Il faut aborder cela comme une formation managériale, insiste Stéphane Breault. Ce que le franchiseur devrait chercher à faire, c’est créer des gestionnaires et des leaders d’exception dans un marché local. »

Secteurs spécialisés

Bien sûr, la question du recrutement n’est pas uniforme d’un secteur à l’autre. Dans celui de la réparation automobile, c’est la main-d’œuvre spécialisée qui fait cruellement défaut. « De 75 % à 80 % des gens qui vont en mécanique auto et qui travaillent dans des ateliers n’ont pas de DEP », explique Yves Racette, directeur du développement des programmes NAPA/NexDrive.

Depuis deux ans, le réseau de magasins de mécanique automobile NAPA multiplie les initiatives pour aider ses franchisés à former leur personnel. En 2021, l’entreprise a mis en ligne une plateforme d’apprentissage nommée NAPA Haute tension. « Plutôt que d’aller chercher la réponse à un problème automobile sur Facebook, les employés de notre réseau peuvent utiliser cette plateforme, explique Yves Racette. C’est de l’information juste, qui a été validée par nos équipes techniques. » Au début de l’année 2023, l’entreprise a aussi fondé un centre de formation national à Terrebonne.

Yves Racette lui-même a été embauché en 2022 pour créer un programme de formation visant à acquérir des compétences sur la réparation de véhicules électriques. Les garages NAPA Autopro qui ont équipé leurs ateliers à cet effet et terminé de former leur main-d’œuvre peuvent dès lors porter la bannière NAPA/NexDrive. « Nos garages certifiés reçoivent beaucoup plus de CV, note-t-il. Les candidats cognent à leur porte parce qu’ils savent qu’ils seront formés à la fine pointe de la technologie pour les nouvelles voitures qui arrivent sur le marché. »

À plus petite échelle et dans un tout autre domaine, la kinésiologue Sarah Baribeau a adopté une stratégie similaire pour soutenir ses neuf centres spécialisés en mise en forme périnatale Bougeotte et Placotine. « Quand j’ai démarré mon réseau de franchises, j’ai pris toutes mes connaissances dans le domaine de la périnatalité et j’ai monté un cours en ligne de 12 heures », explique la présidente fondatrice. Au fil des ans, cette formation est devenue un pôle d’attraction pour les kinésiologues et les entraîneurs qui interviennent auprès de la clientèle. « Nous sommes reconnus comme des experts dans le domaine de la périnatalité. Beaucoup de personnes souhaitent venir travailler dans notre réseau pour se faire former sur le sujet », explique-t-elle.

Sarah Baribeau croit aussi à la force de la marque employeur pour soutenir le recrutement de personnel dans ses succursales. « Nous affichons partout notre “why” et notre mission. Nous éduquons les femmes sur leur propre corps, et les gens veulent faire partie de ce mouvement-là. Je recrute aussi bien des franchisés que des employés de franchise uniquement sur la base de cette mission-là. »

De toute évidence, les franchiseurs ont un précieux pouvoir entre les mains : celui de former la main-d’œuvre. À eux d’en tirer tout le potentiel pour aider les franchisés à rayonner.

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