Ce mois-ci, le CQF s’intéresse à Madame Linda Goulet, Présidente de Panda, qui chausse les enfants depuis près d’un demi-siècle. Bannière emblématique dans le paysage du franchisage au Québec, madame Goulet nous dévoile, sans tabou, sa grande expérience et les nombreux défis auxquels le franchiseur a du faire face au cours de ces longues années. Le CQF remercie chaleureusement Madame Goulet pour ce bon moment de sincérité et de partage d’expériences.
Pouvez-vous nous parler un peu de vous, votre parcours, ce qui vous a amené à la franchise Panda ?
Le premier magasin Panda a été ouvert en 1947. Mon père en a fait l’acquisition en 1972 et dès le lendemain il m’a amené au magasin et m’a dit d’aller vendre. J’avais 15 ans.
En 1974 il a commencé à franchiser. Nous étions les précurseurs du franchisage dans le commerce de détail.
À 19 ans, j’ai relevé un magasin franchisé en difficulté et j’ai fait une offre à mon père de lui racheter le magasin que j’ai revendu un an et demi après pour en ouvrir un autre que j’ai revendu pour rejoindre mes parents au siège social. Et puis j’ai évolué dans l’entreprise, mon premier mandat a été de monter le manuel de formation. Parallèlement j’étais aussi responsable des ouvertures, mise en place des magasins et formation des nouveaux franchisés.
Mes deux frères ont rejoint l’entreprise familiale. Nous avons créé notre propre compagnie et offrions nos services au franchiseur (mon père)
En 1984 nous avons commencé l’expansion en Ontario puis à Vancouver en 1986. Nous avons ouvert plus de 50 magasins en moins de 5 ans. À la fin des années 80 Panda avait 75 magasins au Canada. C’était les belles années du commerce de détail….
Mes frères et moi étions à la direction de l’entreprise depuis quelques années quand mon père a pris sa semi-retraite.
Je suis devenue Présidente en 91 suite au décès de mon père. À cette époque nous étions en pleine crise économique. Nous avons dû fermer des magasins, je me suis occupée de la réorganisation du groupe.
Aujourd’hui je suis seule propriétaire de l’entreprise et confiante en l’avenir.
Vous avez une longue expérience dans le franchisage, que retirez-vous de cette expérience ?
Il y a deux grosses erreurs qui nous ont coûté très cher et qui ont bien failli nous emporter.
Première : Expansion trop rapide. Il est impératif de s’assurer d’avoir une bonne équipe en place pour le suivi après ouverture… Malheureusement nos énergies passées à faire des ouvertures ont permis à certains franchisés de prendre des ‘’mauvais plis’’ et se retrouver vite en difficulté.
Deuxième : Le franchisé doit avoir une implication financière dans son entreprise. Les franchisés qui sont peu ou pas impliqués financièrement ne produisent pas les mêmes résultats. Nous avons dû financer plusieurs franchisés au fil des ans, certains ont réussi et plusieurs ont échoué.
En affaire il y a des hauts et des bas… c’est inévitable. Chez Panda nous avons connu des récessions, crises économiques et maintenant une pandémie… c’est la sixième fois que je recommence à zéro en 45 ans. Il faut une bonne dose de passion et beaucoup de résilience pour passer à travers les tempêtes.
La technologie a évolué rapidement au fil des ans, au début on était en manuel pour tout et maintenant après l’informatisation on est au virage numérique. C’est le rôle du franchiseur de suivre et adapter le réseau et procédures à toutes ces évolutions. Le Franchiseur doit bien comprendre son rôle auprès de son réseau. C’est important d’être bien entouré, de s’impliquer dans les associations, d’anticiper les tendances et de réseauter.
Aujourd’hui le franchisage c’est un partenariat entre le franchiseur et les franchisés. C’est ensemble qu’on évolue.
Le commerce de détail vit de profonds changements, comment vivez-vous ces défis chez Panda ?
Le gros changement des dernières années vient surtout de l’attitude du consommateur qui est de plus en plus informé et exigent.
La pandémie a bouleversé nos vies. Les mesures sanitaires, l’impatience des clients pendant et après la pandémie. C’est un métier difficile dans ces circonstances et nous devons redoubler d’efforts pour motiver et surtout garder nos équipes de vente.
Le plus grand défi actuellement est le recrutement, heureusement autant chez les magasins franchisés que corporatifs nous pouvons compter sur une grande majorité de personnel d’expérience et engagé, c’est une chance pour nous.
Nous travaillons à bonifier les programmes de formation pour permettre à nos équipes de gestionnaires, de conseillères et conseillers de grandir et s’adapter à la nouvelle réalité.
Le commerce en ligne a-t-il explosé pendant et après la pandémie ?
En 2018 nous avons commencé la vente en ligne. Heureusement nous étions prêts quand la pandémie nous a tous frappé. Les mois de confinement et fermeture des magasins a fait exploser les ventes en ligne. Mais dès la réouverture des magasins les clients sont revenus en magasin et les ventes en ligne ont repris un niveau plus normal représentant +/- 10% des ventes du réseau.
Vous êtes dans un marché spécialisé, celui de la chaussure et accessoires pour bébés, enfant et adolescent, comment voyez-vous l’évolution de ce marché et de ses clients?
Malheureusement notre marché n’est pas un marché en croissance due au faible taux de natalité au Québec. J’espère que la pandémie nous fera vivre une augmentation de naissances, un petit babyboom serait bienvenue… 😊
Plus sérieusement, notre chance c’est d’avoir quatre saisons et que les enfants grandissent. Par ailleurs, en étant spécialisés les clients préfèrent passer en magasin pour s’assurer d’un bon ajustement et d’avoir les bonnes chaussures pour les bonnes occasions.
Nous chaussons les enfants dès leur premier pas, vers l’âge de +/- 9 mois, notre défi est de les garder le plus longtemps possible. Comme les enfants sont de plus en plus grand, nous avons introduit des plus grandes pointures dans nos magasins.
Vous êtes dans la franchise depuis des années maintenant, quelle est le secret de longévité ?
C’est tellement important de communiquer et je vous avoue que nous avons manqué à cet égard par le passé. Franchiseur et franchisés sont en fait des partenaires avec des objectifs communs. Le passé n’est plus garant de l’avenir, il faut s’adapter, évoluer et investir. Le franchiseur doit absolument être passionné et impliqué. Il faut qu’il fasse ses devoirs, qu’il expérimente son modèle.
Mais au-delà des affaires, nous sommes tous des humains. C’est en parlant qu’on se comprend.
Il faut changer les vieilles mentalités, COMMUNIQUER de part et d’autre. Ça veut dire écouter et être ouvert d’esprit.
Il faut de la patience, de la résilience et savoir anticiper les problèmes. Un franchiseur est comme un père/mère envers ses franchisés, l’entreprise doit être gérée en ‘’bon père de famille’’. Comme les enfants d’une même famille, chaque franchisé est différent, il faut être attentif aux non-dits. Encourager la conversation et échanges d’idées. Je n’ai jamais eu à sortir un contrat quand il y avait des problèmes avec nos franchisés.
Coté franchisé, outre l’aspect financier, le défi est de trouver des gens passionnés, engagés et motivés par le désir de réussir et progresser.
Quelles sont vos perspectives de développement ?
Après avoir eu 75 magasins partout au Canada, nous avons maintenant 22 points de vente au Québec (14 corporatifs et 8 franchisés). Le marché québécois est pas mal couvert, nos perspectives de développement sont davantage en ligne pour développer d’autres marchés.
Comment le CQF peut vous aider ?
Continuer à représenter le secteur de la franchise au Québec.
Les webinaires et table ronde pour partage d’expérience entre franchiseurs sont très appréciés.
Que peut-on vous souhaiter ?
Santé et pérennité de notre belle entreprise.
J’ai la chance d’avoir de la relève avec ma fille et une équipe de direction extrêmement engagée et compétente.
Longue vie à Panda qui soulignera ses 75 ans en 2022 !!!