Le modèle d’affaires de la franchise occupe une place importante au sein de l’entrepreneuriat québécois. La fiscalité du monde de la franchise possède ses particularités.

Cet article présente certains éléments que tout franchisé ou franchiseur devrait connaître afin de maximiser sa situation fiscale.

 

Le traitement fiscal des fonds de publicité

Un des attraits du modèle d’affaires de la franchise consiste en la possibilité pour un nouvel entrepreneur de s’associer à un réseau et à une marque déjà connus du grand public. La publicité faite pour le compte des franchisés est donc souvent, du moins en partie, un service centralisé et orchestré par le franchiseur.

Habituellement, les franchisés paient une cotisation annuelle au franchiseur, qui constitue un fonds de publicité. Le fonds est utilisé pour couvrir les coûts des efforts publicitaires du groupe.

Est-ce que la contribution au fonds de publicité pour le franchisé constitue une dépense déductible de son revenu imposable? Et qu’en est-il pour le franchiseur qui reçoit ce montant?

Le contrat de franchise permet souvent de mieux comprendre le contrôle qu’exercent le franchisé et le franchiseur sur le fonds de publicité. L’Agence du revenu du Canada s’est prononcée sur le sujet dans une interprétation technique (9819787 Redevances à recevoir, Fonds de publicité) afin de clarifier le traitement fiscal approprié pour les franchisés et les franchiseurs.

 

Lorsque le franchiseur ne détient aucun contrôle sur les contributions

 

Lorsque ni le franchisé ni le franchiseur ne possèdent réellement le contrôle du fonds de publicité, les contributions au fonds de publicité constituent des dépenses déductibles pour les franchisés puisqu’elles sont engagées dans le but de tirer un revenu. La dépense est donc déductible dans l’année où elle est payée ou payable.

Quant au franchiseur, s’il fait lui-même des contributions au fonds de publicité, ces contributions seront déductibles au même titre que pour le franchisé. Étant donné que le franchiseur ne détient aucun contrôle sur l’utilisation des fonds en lien avec les nombreuses obligations qu’il a envers les franchisés, il est possible de conclure, et ce, bien que ce dernier perçoive les cotisations, qu’il demeure indépendant du fonds et que la dépense serait déductible.

Pour cette même raison, les cotisations reçues ne seront pas incluses dans le revenu du franchiseur, étant donné que les fonds ne sont pas la propriété de ce dernier. Il est à noter que, sur le plan comptable, les transactions affectant le fonds de publicité sont généralement comptabilisées exclusivement au bilan, sans impact sur les résultats.

 

Lorsque le franchiseur exerce un contrôle sur les contributions

 

Si le contrôle sur le fonds de publicité appartient plutôt au franchiseur selon les faits et les circonstances du contrat de franchise, les contributions versées par les franchisés devront être incluses dans les revenus du franchiseur. Ainsi, s’il y a un surplus à la fin de l’année pour des services à rendre, il pourrait être possible pour le franchiseur d’établir une provision raisonnable pour les services de publicité qui seraient à fournir après la fin de l’année.

De plus, contrairement à la situation dans laquelle le franchiseur ne détient aucun contrôle du fonds, les contributions de ce dernier ne seront déductibles qu’au moment où les dépenses seront réellement effectuées. Les contributions du franchiseur seront, dans les faits, des montants réservés pour des dépenses éventuelles et donc non déductibles au moment de la cotisation. Pour les franchisés, le traitement fiscal des contributions restera le même que dans la première situation.

 

Redevances et honoraires de gestion

Les redevances et les honoraires de gestion ne sont pas propres au secteur de la franchise, mais font souvent partie intégrante d’un contrat de franchise.

Les redevances sont des sommes payées par le franchisé au franchiseur en échange de l’utilisation de certains actifs (p. ex., marque de commerce, brevets). Le paiement d’une redevance est une dépense déductible pour le franchisé et est imposable pour le franchiseur qui le reçoit.

Dans le contexte des franchises, les honoraires de gestion sont souvent utilisés afin de répartir les dépenses engagées par le franchiseur au profit des franchisés en échange de certains services (p. ex., négociations avec les fournisseurs, gestion des stocks). Les honoraires de gestion étant souvent utilisés au sein d’un regroupement de sociétés, ils font souvent l’objet d’une contestation de la part des administrations fiscales, surtout dans le cadre de transactions avec lien de dépendance.

De façon générale, afin qu’une dépense soit déductible du revenu d’un contribuable, elle doit avoir été engagée dans le but de gagner du revenu et être raisonnable. La première partie du critère est habituellement facilement respectée dans le contexte de la franchise, puisque les franchisés ont comme objectifs commerciaux de générer du revenu afin d’accroître la valeur de l’entreprise pour les actionnaires.

Toutefois, ce que représente une dépense raisonnable n’est pas défini dans la Loi de l’impôt sur le revenu. Les positions étayées par les administrations fiscales ainsi que la jurisprudence en la matière nous permettent d’identifier certains facteurs qui seront considérés lors de l’analyse de la raisonnabilité. Généralement, les administrations fiscales considèrent que les honoraires de gestion sont raisonnables s’ils représentent la juste valeur marchande des services rendus.

Lorsque la juste valeur marchande du service rendu est facilement comparable, elle pourrait servir de balise afin d’établir un certain appui à la raisonnabilité. De plus, lorsque le franchisé et le franchiseur n’ont pas de lien de dépendance entre eux, il est plus difficile de prétendre que les transactions seraient effectuées à des valeurs qui diffèrent de façon considérable de la juste valeur marchande puisque le franchisé et le franchiseur ont chacun des intérêts économiques distincts, soit la profitabilité de leur société respective.

Il n’est pas rare qu’un franchiseur offre à ses franchisés une formule incluant la prise en charge de plusieurs tâches administratives. Le regroupement de ces tâches peut permettre aux franchisés non seulement de réaliser des économies d’échelle, mais aussi de concentrer leurs efforts sur la gestion des affaires courantes de l’entreprise.

Le franchiseur peut procéder à la refacturation aux franchisés des frais engagés, incluant une majoration ne dépassant pas 15 %, ce qui est habituellement considéré comme raisonnable.

En somme, l’aspect raisonnable des honoraires de gestion est une question de fait, ce qui doit être analysé pour chacune des situations afin de s’assurer que la dépense est déductible pour le franchisé. Il faut être particulièrement prudent dans une situation de lien de dépendance où les intérêts économiques de chacune des parties ne sont pas toujours distincts. De plus, le franchiseur doit s’assurer de conserver de la documentation pour justifier les montants facturés à titre d’honoraires de gestion.