Lors de son dernier Gala, le Conseil québécois de la franchise a décerné à Alain Beaudry un Maillon d’or pour célébrer ses 30 ans de succès. Voici donc notre entretien avec un leader qui a su faire évoluer son entreprise, et en faire une marque forte à laquelle adhère un réseau de 1700 employés et plus de 300,000 membres. Le taux de satisfaction des membres Énergie Cardio est de 92%. De quoi être très fier!
Avec 85 franchises et succursales, difficile de ne pas reconnaître qu’Énergie Cardio et ses franchises constituent un modèle entrepreneurial au Québec. Avec pour slogan, ‘On change le monde’, Alain Beaudry, PDG, se livre à cet exercice de découverte de l’homme derrière le succès!
Racontez-nous la petite histoire d’Énergie Cardio?
C’est une histoire qui remonte à trente ans. À ce moment, mon rêve était de partir en affaires. Un de mes frères était propriétaire d’un centre de racquetball à St-Jérôme, ma ville natale. Il me dit un jour que le racquetball était en déclin, mais qu’il y avait peut-être quelque chose à faire pour apporter de nouveaux éléments pour que ça fonctionne. Il m’a offert de louer le centre et de me laisser en charge des opérations. J’ai accepté très volontiers.
J’avais entendu parler du fait qu’il y avait des centres de sports qui fonctionnaient au Québec, donc je suis parti sur la route pour aller visiter plusieurs de ces endroits. Je suis allé visiter des centres où l’on offrait la pratique de plusieurs sports. J’ai constaté ce qui fonctionnait et pourquoi, et inversement, ce qui ne fonctionnait pas et pourquoi. Certains centres comme à Lévis et à Rimouski allaient bien, ils avaient ajouté des salles de groupes et de l’équipement d’entraînement. Les centres de conditionnement physique, comme on les connait aujourd’hui, n’existaient pas encore. À l’époque, c’était la mode du « bodybuilding ».
À partir de ce constat, j’ai développé l’idée de salles de conditionnement physique ouvertes à tous. J’ai donc embarqué et j’ai dit à mon frère, je suis prêt, mais il faut que tu me prêtes de l’argent. Il a dit oui, et je me suis aperçu dès le départ que ce concept « entraînement pour tout le monde » était porteur. Avec mes employés dont certains étaient kinésiologues, qu’on appelait à l’époque un éducateur physique, on a raffiné le concept (alimentation saine, programmes d’exercices) et ça a levé. Au bout d’un an, j’ai dit à mon frère que je déménageais mon gym au centre-ville de St-Jérôme. L’année d’après en 1986, j’ouvrais mon premier centre en solo.
D’où vient l’appellation Énergie Cardio?
Cela a pris du temps, nous avons évalué plusieurs noms. À l’époque, on achetait des appareils de marque Nautilus, l’entreprise nous donnait le droit d’utiliser le nom dans nos propres centres. Donc, notre centre s’est aussi appelé Nautilus St-Jérôme. À un moment donné, il y avait au moins une dizaine de Nautilus, mais qui n’étaient pas reliés ensemble. On a donc voulu se distinguer et en 1995, on a décidé de choisir le nom Énergie Cardio.
Vous êtes devenu entrepreneur dans le domaine du conditionnement physique, est-ce que vous auriez pu opter pour un autre choix ?
Je ne suis pas un athlète, ni un professionnel du conditionnement physique. Je suis « monsieur, madame tout le monde ». Foncièrement, je suis un administrateur. J’ai travaillé pendant 12 ans pour une compagnie dans le domaine du financement et j’aimais déjà beaucoup le marketing. Je me suis dirigé dans ce domaine parce que mon frère m’a offert une occasion d’affaires. En fait, j’ai déjà dit devant mes 850 employés : Vous pourriez tous être ici dans un congrès de sauces et d’épices. Six mois avant de lancer Énergie Cardio alors que j’étais à la recherche d’un projet d’entreprise, j’avais fait une offre d’achat pour une telle entreprise, mais elle n’avait pas été acceptée. C’était le bon moment pour moi de partir en affaires.
Des qualités très utiles en entrepreneuriat: l’administration des affaires et le marketing…
Je pensais à l’époque et même encore aujourd’hui que ce sont les principaux atouts pour moi comme entrepreneur. Je faisais du financement et je m’intéressais beaucoup à la publicité, à la sollicitation pour stimuler les ventes. J’aimais ça! Ça m’intéressait et je me démarquais là-dedans. J’avais un bagage (en administration et en marketing) qui me permettait de me lancer en affaires, peu importe le type d’entreprise au détail.
On dit toujours qu’en affaires, 75% de tes décisions doivent être bonnes. On n’a donc pas beaucoup de marge de manœuvre. Et, je savais aussi d’expérience, pour l’avoir vu auprès d’autres entrepreneurs dans mon travail à l’époque, qu’il ne faut jamais prendre de grosses décisions sur le coup de l’émotion comme l’orgueil ou la colère.
Comment s’est imposé le modèle de la franchise ?
Tout cela est venu naturellement en lien avec le résultat positif de nos actions, du travail qu’on accomplissait et de la progression du commerce qu’on constatait.
J’ai ouvert un premier et très petit centre à St-Jérôme. Ce centre avait environ 4 900 pieds carrés, aujourd’hui notre plus petit centre a environ 12 000 pieds carrés. C’était très différent comme concept, ça plaisait aux gens. Par exemple, les gens avec un surpoids n’allaient pas au gym, c’était intimidant.
Nous avons innové avec un programme de diète et d’exercices. Nous proposions un bon régime alimentaire avec un entraîneur privé. Aujourd’hui c’est devenu la norme. À l’époque, c’était révolutionnaire. Ça s’adressait à tout le monde. C’est vite devenu un « success story » et voilà que des employés, des clients m’approchaient pour me dire qu’ils voulaient ouvrir un centre.
La première franchise est venue en 1992. On avait ouvert une cinquième succursale à Terrebonne, un membre m’appelle pour voir si je voulais lui vendre une franchise pour qu’il puisse ouvrir un centre à Montréal. Il n’avait jamais vu ce type de concept et il aimait ça…
Montréal c’est gros! Je me disais ça à l’époque… Je suis allé voir des professionnels, des avocats et on a concocté un premier contrat de franchise. Le commerce situé au coin de Jean-Talon et Pie IX est toujours en opération! Par la suite, nous avons développé jusqu’à 6 franchises par année. Ça a été rapide, car les gens s’intéressaient beaucoup à notre concept. Tout de même, à nos débuts comme franchiseur c’était comme suivre un cours universitaire sur le terrain. Nous avons eu des craintes, des doutes en cours de route et effectué des passages obligés, en somme.
À l’époque , il y avait peu de bannières en franchise. On connaissait Dunkin’ Donuts, McDonalds, St-Hubert, Sports Experts, et c’étaient des cercles fermés. Il n’y avait pas de place pour les rencontres. On faisait affaires avec des généralistes qui nous aidaient du mieux qu’ils le pouvaient.
Quelle est votre perception du modèle d’affaires à ce moment-ci ?
J’aime beaucoup ce qui se passe. Si j’avais eu tous ces outils quand j’ai débuté, cela m’aurait permis d’éviter des erreurs coûteuses. Avec toute l’aide qui est disponible aujourd’hui, je n’aurais pas pris certains chemins.
J’admire le travail qui se fait pour développer la franchise. J’admire ce qui se fait par le Conseil québécois de la franchise pour aider les franchiseurs et les franchisés. C’est tellement précieux d’avoir accès à toute cette aide-là. Ça peut tellement éviter aux gens de tomber dans des pièges qui sont faciles à détecter pour quelqu’un d’expérimenté, mais presque invisible pour un profane.
Vous avez à desservir tout un réseau, quel est votre point de vue sur les attentes des franchisés?
Tout cela a beaucoup évolué. Mais, pour moi, c’est la façon dont le franchiseur informe et cultive sa relation au fil des mois et des années avec ses franchisés qui compte le plus.
La transparence, aussi, au plus haut niveau possible sur les frais qui sont chargés par exemple, sur tout ce qui se passe dans l’entreprise, sur ses développements, sur ce qui est en train de se faire, etc. Vraiment, un des meilleurs atouts pour bien répondre aux attentes des franchisés est l’honnêteté.
Il y a de bons franchiseurs et de bons franchisés comme de mauvais. Ceci dit, après 31 ans, je peux dire que les franchisés que nous avons représentent la crème de la crème. Ce sont des gens qui y croient, qui ont passé à travers des difficultés et qui sont passionnés! Bref, qui investissent dans leur entreprise! Je les respecte au plus au point.
Pour moi, la relation franchiseurs-franchisés doit être harmonieuse. Il faut toujours être à l’écoute. Le travail dans la crainte et la méfiance met des barrières qui deviennent infranchissables et ça crée des conflits, ce qui est néfaste pour la marque!
Quel conseil donneriez-vous aux franchiseurs?
Il y en a plusieurs… C’est sûr qu’en 31 ans de travail j’en ai appris des choses. Mais, le plus important à mon avis est de bien choisir ses franchisés, d’avoir un processus de sélection rigoureux. Les erreurs qu’on peut faire, par exemple, d’avoir trop d’enthousiasme et de vendre une franchise au premier venu… se dire : Wow, il s’intéresse à mon concept. Il faut prendre le temps de voir si le candidat est compatible avec soi, avec le produit à vendre, saisir sa personnalité, etc. Car, il doit poursuivre dans le créneau du franchiseur, le respecter. C’est ainsi que se développe plus facilement l’harmonie souhaitée.
Quel est votre meilleur conseil au franchisé ?
Je lui dirais : va voir de très près qui est ton franchiseur. Sur nos contrats de franchise, par exemple, il est stipulé clairement que la personne s’est informée correctement, qu’elle s’est entraînée chez nous, qu’elle a vu ce qui se faisait, qu’elle a pris toutes les informations, qu’elle comprend bien le concept de l’entreprise, ses valeurs, ses principes et s’en déclare satisfaite. Et il faut que ce soit vrai.
Je dis toujours au franchisé, quand tu viens signer un contrat de franchise, tu dois tout savoir! Bien connaître qui sont vraiment les dirigeants de l’entreprise. Il lui faut signer en toute connaissance de cause. C’est le meilleur conseil que je puisse donner.
Quel est votre trait de personnalité qui vous sert le mieux comme entrepreneur?
Le leadership! Il faut un patron qui tranche le moment venu. Ici, nous travaillons beaucoup en comité. Nous faisons des « brainstorming », des réunions de franchisés, nous avons des rencontres obligatoires quatre fois l’an. C’est une entreprise au fonctionnement très démocratique. On demande l’avis de tout le monde, à tous les niveaux. Mais, si l’on écoute tout le monde, personne ne prend de décision… Alors, comme leader mon travail est d’observer, d’écouter et de trancher.
Nommez-moi un dirigeant ou une entreprise qui vous inspire?
J’en ai quelques-uns, tous aussi importants : René Léger, fondateur des Rôtisseries St-Hubert, Jean Coutu, Claude Beaulieu de Sports Experts, Alain Bouchard fondateur de Couche-Tard. Ce sont pour moi des gens très inspirants.
Quel est le conseil qui vous a le mieux servi dans votre travail ?
Un de mes patrons m’avait dit, alors que j’étais directeur de succursale et que j’avais 6 employés sous ma supervision: Les gens que tu vas embaucher pour travailler vont être à ton image. Ils seront ton reflet auprès de ta clientèle. J’ai retenu que la façon dont on s’entoure c’est ce qui va donner le résultat que l’on voudrait avoir. Je fais donc attention pour bien m’entourer!
Merci Alain Beaudry pour ce privilège de vous rencontrer. Nos félicitations ! Bonne continuité aux Entreprises Énergie Cardio.
Merci à vous!