Le rôle des directeurs de territoires a beaucoup évolué au cours des dernières années. De contrôleurs, ils sont devenus, au fil du temps, des conseillers dans la plupart des réseaux. Tel que décrit dans mon article précédent, l’évolution du rôle est en corrélation avec l’évolution des relations entre franchiseur et franchisés. La réflexion à se poser est la suivante : est-ce que la solution la plus performante pour aider les franchisés est de les conseiller ou de les coacher?

 

Les chiffres parlent d’eux-mêmes

  • Selon l’auteur du livre Coaching for performance, une étude révèle que, 3 mois après s’être fait dicter quoi faire, l’on retient 10 % des conseils que l’on a reçus, mais 65 % de ce que l’on nous a montré et laissé expérimenter, ce que le coaching permet.[1]
  • Les acteurs des entreprises qui mettent le coaching au cœur de leurs stratégies d’accompagnement passent la majorité de leur temps en mode apprentissage, ce qui augmente la performance des franchisés.

Mis à part ces deux énoncés, l’évolution de l’industrie de la franchise rend nécessaire la prise du virage, pour les conseillers, vers le coaching. Premièrement, les franchisés de plusieurs réseaux de franchises sont rendus expérimentés, matures et ont développé de belles compétences comme entrepreneurs. Il devient alors difficile de leur allouer des directeurs de territoire qu’ils trouvent crédibles et assez expérimentés pour eux. L’approche de coaching, tel que vous le verrez dans l’article, apporte une solution à ce type de problème. Deuxièmement, plusieurs réseaux privilégient de plus en plus le multi franchisage[2], ce qui rend plus complexe le rôle des directeurs qui en ont déjà beaucoup sur les épaules. Le coaching permet d’enlever une charge aux directeurs et de diriger leur énergie vers des actions plus stratégiques. Enfin, les franchisées de la génération Y répondent vraiment mieux à une approche de coaching qu’à une approche directive et selon les statistiques, ils sont de plus en plus nombreux au sein des réseaux : 20 % des exécutifs du franchiseur et 10 % des franchises et ces chiffres croissent de façon exponentielle. [3]

 

Différences entre conseiller et coacher

Les deux ont l’objectif louable d’offrir un support aux franchisés. Les différences peuvent sembler subtiles, mais elles sont bien présentes au niveau de ce que l’on dit ou ne dit pas aux franchisés, et de ce que l’on fait ou ne fait pas. Voici quelques exemples concrets :

  • Un conseiller est un bon communicateur, un bon coach, écoute!
  • Un conseiller excelle dans l’art d’influencer, un bon coach fait prendre conscience.
  • Un conseiller se doit d’être connaissant dans toutes les sphères de l’entreprise, il a donc une énorme pression sur les épaules. Un coach pose les bonnes questions pour faire émerger les réponses de la bouche même du franchisé.
  • Un conseiller peut se tromper en orientant le franchisé vers les mauvaises solutions, un bon coach, responsabilise le franchisé qui décide de ses propres actions.
  • Un bon conseiller est confiant, un bon coach rend les franchisés confiants en eux.

 

De conseiller à coach

Un changement fondamental est nécessaire pour coacher les franchisés plutôt que de les conseiller. Par habitude, la plupart des directeurs de territoire et des conseillers ont plutôt tendance à donner leur opinion, à donner des solutions, bref, à prendre le lead de chaque problématique. Il s’agit de réflexes normaux compte tenu de la nature de leur travail. C’est aussi parfaitement cohérent avec le mode relationnel de franchise où le franchiseur se sent l’obligation de donner un maximum de services aux franchisés. Toutefois, donner les solutions « toutes cuites dans l’bec » a uniquement pour avantage d’aider à court terme le franchisé. À long terme, ce dernier risque de devenir dépendant des conseils du directeur de territoire et ne développera pas ses propres habiletés en leadership. Tel que décrit dans notre article précédent sur les relations entre franchiseurs et franchisés, le coaching permet réellement de faire croître un réseau en rendant chacun des franchisés autonome et responsable du développement de sa propre franchise. Le coach a une relation d’égal à égal avec le franchisé, il n’est ni supérieur, ni plus expérimenté. Il est celui qui aide à voir clair par des questions stratégiques et en mettant de côté son égo. Le coach fait émerger les compétences des franchisés en encadrant la relation par une méthode et des outils performants.

 

Méthode de coaching

Il existe de multiples méthodes de coaching. L’important est de trouver celle avec laquelle vous serez confortable. Une méthode très simple à comprendre est la méthode GROW[4] qui consiste en une démarche en quatre étapes durant laquelle le coach posera des questions stratégiques au franchisé :

  • G pour Goal (objectif): cette première étape a pour but d’aligner l’ensemble de l’échange vers le bon objectif. Cette étape peut prendre 10-15 minutes, comme elle peut prendre plusieurs rencontres en fonction de la problématique. C’est une étape durant laquelle les conseillers ont tendance, en cours d’apprentissage du coaching, à faire les coins ronds.
  • R pour Reality (réalité): cette étape est celle où l’on explore l’ensemble des faits, des ressources, de ce qui a été essayé, bref, la situation.
  • O pour Obstacles et Options: les questions, à cette étape, doivent servir à faire émerger plusieurs solutions qui pourront, par la suite, être analysées afin de trouver la meilleure.
  • W pour Will/Wrap up (plan d’actions) : l’étape où l’on choisit le plan de match, la solution qui sera mise en œuvre.

Attention, bien qu’il soit facile de comprendre les 4 étapes ci-haut mentionnées, la difficulté réside dans l’exécution de ces dernières. Coacher est une philosophie d’intervention, une approche collaborative et non une méthode rigide. La plus grande difficulté réside dans le fait de poser les bonnes questions. Il est aussi facile de tomber dans de nombreux pièges lorsque l’on tente de coacher. Lorsque je forme des conseillers à devenir des coachs, ils tombent naturellement dans différents pièges à cause de leurs habitudes bien ancrées de conseillers, dues aux difficultés de mettre en pratique la philosophie du coaching. Ce que les conseillers constatent lorsqu’ils deviennent habiles en coaching est à quel point le coaching permet de développer les franchisés, les rend plus autonomes et leur fait prendre conscience de leur plein potentiel.

Je vous invite à consulter, en avril, la partie 2 de mon article qui présentera les principales erreurs que j’observe lorsque j’aide les conseillers de réseaux de franchises à devenir de meilleurs coachs. Je traiterai des défis que rencontrent la plupart des réseaux lors de l’implantation de ce changement de façon à aider les franchisés, ainsi que comment maîtriser la subtilité du coaching.

 

Sylvie Grégoire, MBA, CRHA

Présidente, Totem Performance organisationnelle

[1] WHITMORE, John, Coaching for performance, 4e édition.

[2] NATHAN, Greg, 7 Trends changing the face of franchising, February 18, 2015

[3] http://franchiseblast.com/how-forward-thinking-franchises-coach-their-franchisees/

[4] WHITMORE, John, Coaching for performance, 4e édition.